Guerre dans le Kivu au Congo: les dessous des cartes

Publié le par Firmin Luemba

Démission du Général Vicente D. de Villegas de la Monuc
Guerre dans l'est de la République Démocratique du Congo: les dessous des cartes

La démission du général Vicente Diaz de Villegas du commandement en chef des forces de la Monuc est un fait insolite. Elle risque de provoquer un électrochoc au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies. Mais être également révélatrice de beaucoup de choses qui se cachent derrière cette guerre de l’Est qui est en train de livrer ses secrets.

La guerre du Kivu est en train de prendre un autre tournant avec la démission du général espagnol Vicente Diaz de Villegas, alors commandant en chef des forces de la Monuc. Nommé, il y a de cela deux mois en remplacement du général sénégalais Babacar Ndiaye, fin mandat, le général Vicente n’ a eu juste que le temps de parcourir les premiers dossiers avant de décider de déposer sa démission.


Officiellement, pour des « raisons personnelles ». Mais le prétexte est beau pour être vrai. Dans les milieux diplomatiques ainsi que dans les couloirs de l’Onu, l’on fait savoir qu’il a démissionné, faute de moyens pour faire face à la situation sur le terrain.

Cette raison est plausible dans la mesure où, déjà du temps de Kofi Annan, alors secrétaire général de l’Onu, il avait proposé au Conseil de sécurité de renforcer le dispositif militaire de la Monuc. Il s’en est allé sans une réponse positive.


Pas plus tard que le 3 octobre, lors de la 63ème session de l’Assemblée générale de l’Onu, Alan Doss, représentant spécial du secrétaire général de l’Onu et responsable de la Monuc, a transmis un rapport allant dans ce sens en insistant sur la gravité de la situation sur le terrain. La réponse se fait attendre, jusqu’à ce jour. Elle risque aussi de ne pas être positive.


Une fois sur le terrain, le général Vicente s’est effectivement rendu compte de la réalité et des besoins qu’il fallait pour permettre à la Monuc de bien accomplir sa mission. Les moyens sont insuffisants, susceptibles de faire de la Monuc la cible facile. Il a reconnu que la Monuc était incapable de faire cesser les combats et imposer le cessez-le-feu. Il a préféré démissionner.


Bien avant qu’il ne prenne cette décision, la Belgique, par le canal de son ministre des Affaires étrangères, Karel De Gucht, avait souligné la nécessité d’un « mandat fort » à la Monuc en ce qui concerne la guerre du Kivu.


LES NON-DITS


Cependant, les observateurs s’imposent une analyse approfondie autour de cette démission du général espagnol. En effet, en arrivant en RDC, il est supposé qu’il connaissait parfaitement l’état de la logistique et l’effectif militaire de la Monuc. Militaire de carrière, il avait certainement une idée exacte de ce qu’il attendait. Pourquoi s’est-il soudainement rebiffé pour déposer sa démission ?


Les mêmes observateurs sont convaincus que le général espagnol a découvert « quelque chose » qui l’a choqué et allait à l’encontre de sa mission. L’on parle des réseaux « pas du tout corrects » qui affecteraient l’objectif de la Monuc, réseaux « maffieux », diraient certains, dont les tentacules seraient dans toutes les parties prenantes à ce conflit.


Militaire, homme de principe et d’honneur, il était convaincu qu’il allait échouer devant toutes « ces entraves » qu’il venait de découvrir. Pour éviter qu’on lui fasse porter le chapeau, il a préféré, en âme et conscience, démissionner pour ne pas se salir les mains.


LE GOUVERNEMENT INTERPELLE


Cette hypothèse rejoint toutes les rumeurs autour de cette guerre du Kivu. Une guerre aux enjeux divergents. Une affaire « de gros sous » pour autant que certaines personnalités, tant nationales qu’étrangères, en ont fait leur fonds de commerce. Le général Vicente a sûrement découvert le « pot aux roses ».


Incontestablement, le Conseil de sécurité a été mis devant ses responsabilité s. Il s’agit d’une première dans les annales de cette organisation. L’on est convaincu que cette démission provoquera un électrochoc à l’Onu et que l’on tirera sûrement les leçons utiles pour la crédibilité de l’Onu.


Entre-temps, il revient au congolais de tirer également, de son côté, les enseignements de cette démission. De l’approfondir pour maîtriser les causes internes de ce que l’on qualifie déjà « d’échec », et adopter une attitude conséquente et non narcissique. La paix est primordiale. Elle est voulue et demeure avant tout une affaire des Congolais.


Dès lors que l’on observe la reprise du ballet diplomatique depuis 48 heures, il faut saisir cette opportunité pour faire avancer le train de la paix au moment où les choses se compliquent au Nord-Kivu. A Kinshasa, le Premier ministre s’est entretenu lundi avec Alan Doss de la Monuc, lequel à son tour a réuni les ambassadeurs du groupe de contact. Hier mardi, les mêmes diplomates se sont entretenus avec le président de la République. Il s’agit principalement des représentants de la France, de la Belgique, des Etats-Unis, de l’Afrique du Sud.


Entre-temps, Louis Michel, Commissaire européen en charge du Développement et de l’Aide humanitaire, est attendu ce mercredi à Kinshasa. L’un des volets de son voyage concerne la situation de guerre à l’Est du pays. Il a été dépêché par la Commission européenne.

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